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FIERS DE NOS ÉLÈVES : Julie Héraclès, Autrice de « Vous ne connaissez rien de moi »


Découvrez le parcours inspirant de Julie Héraclès, autrice passionnée et élève des Artisans de la Fiction, dont le premier roman, « Vous ne connaissez rien de moi », plonge les lecteurs dans l’univers complexe et captivant de « La tondu de Chartres ». À travers cette interview exclusive, Julie nous livre les coulisses de son processus créatif, sa démarche artistique et les défis surmontés pour donner vie à son récit unique. Plongez dans l’univers littéraire de Julie Héraclès et explorez les secrets de la narration, de la recherche historique et de la transformation d’une passion en une œuvre marquante.

 

Comment vous êtes-vous formée à l’écriture ?
J’ai d’abord suivi des études de lettres puis de journalisme. Puis, pendant une dizaine d’années, j’ai écrit des nouvelles, participé à des concours. En 2019, j’ai décidé de me lancer dans l’écriture d’un roman.
J’ai d’abord écrit un premier jet pendant un an. A la relecture de ce premier jet, je me suis rendu compte que mon texte manquait de tension narrative. C’est à ce moment-là que j’ai fait une recherche pour savoir s’il existait des ateliers ou des cours consacrés à l’écriture. Lors de cette recherche, j’ai découvert les Artisans de la fiction. Ce que vous proposiez m’intéressait parce que j’avais vraiment l’impression que les cours seraient consacrés aux techniques narratives. Et je ne me suis pas trompée. J’ai suivi pendant trois ans le cursus dédié à la narration littéraire. 

Qu’est ce que cela vous a appris ?

J’ai appris à faire la distinction entre les scènes actives et réactives. Ces alternances de scènes constituent tout roman, quel qu’il soit. J’en avais conscience mais de manière instinctive. Grâce aux cours d’écriture créative, j’ai théorisé cette notion et je l’ai appliquée dans mon roman. Je dirais que, pour moi, c’est le principal apport. Il y en a eu d’autres, comme le travail sur la voix des personnages, le choix du point de vue, la matrice des personnages, le travail sur les dialogues. 

Comment avez-vous travaillé sur « Vous ne connaissez rien de moi » ? Avez vous préparé en amont, construit une structure, ou vous êtes vous lancée dans l’écriture ?
Je connaissais le début et la fin. Je savais que le fil conducteur de mon roman serait la journée du 16 août 1944. Ensuite, je me suis lancée dans l’écriture sans avoir de structure préétablie. J’avais l’impression que mes personnages prenaient vie au fil de l’écriture et que je ne pourrais pas respecter de plan établi en amont. 

Avez-vous effectué beaucoup de recherches ? De quel type ? Comment avez-vous travaillé l’univers narratif ?

Oui, les recherches ont été nombreuses. Tout d’abord, j’ai lu une enquête historique consacrée à cette femme. Ce livre m’a fourni des repères biographiques. Ensuite, j’ai fait des recherches essentiellement pour construire mon univers narratif. J’ai ainsi lu des romans écrits dans les années 40 pour savoir comment les gens s’exprimaient à cette époque, notamment « Journal à quatre mains » de Benoîte et Flora Groult. J’ai d’ailleurs été surprise par la modernité de la langue.

J’ai vu des films pour savoir comment les gens s’habillaient et vivaient au quotidien, notamment « Une affaire de femmes » de Claude Chabrol. J’ai consulté des cartes postales de Chartres datant de la première moitié du 20ème siècle afin d’avoir une idée précise des rues, des maisons, de la configuration de la ville. 

Est-ce que le fait de bien connaître Chartres vous a aidé ?
Bien sûr, connaître Chartres a été fondamental. J’ai puisé dans mes souvenirs pour raconter les déambulations de Simone dans les rues chartaines. 

Pouvez-vous nous parler du choix de point de vue ? Avez-vous hésité, avec d’autres hypothèses ?
Le choix du point de vue a été une grande interrogation lorsque j’ai commencé à écrire. J’ai d’abord choisi la troisième personne. Mais j’ai vite trouvé que la première personne me permettait plus de proximité avec mon héroïne. Et deuxième raison, je prenais plus de plaisir à écrire à la première personne. J’ai donc changé de point de vue en cours de route pour finalement adopter la première personne. 

Comment avez-vous travaillé la voix de votre narratrice ?

La voix de ma narratrice est arrivée dans un second temps, au moment de la relecture du premier jet. Je n’étais pas satisfaite de la voix initiale que j’avais donnée à Simone, je trouvais qu’elle manquait de personnalité. En lisant des romans écrits dans la première moitié du 20ème siècle, j’ai pris conscience que je pouvais me permettre plus de libertés et que cela ne serait pas anachronique. Simone est issue d’une famille de petits commerçants. J’ai choisi de la faire parler de manière dépouillée, parfois crue. 

Choisir les comparaisons qu’elle utilise a-t-il été difficile ?
C’est vrai que Simone a un langage souvent imagé. Je me suis appuyée sur le champ lexical utilisé dans des romans publiés dans les années 30 et 40. Pour être certaine de ne pas commettre d’anachronismes, j’ai systématiquement vérifié les dates d’occurrence du vocabulaire employé et ce, grâce au site du CNRTL (Centre national de ressources textuelles et lexicales).  

Pouvez-vous nous parler de l’alternance de temporalités (souvenir, présent de l’action) ? Comment avez-vous procédé ?
L’alternances des temporalités s’est imposée d’emblée. Je savais que je voulais raconter la journée du 16 août 1944 dans ses moindres détails. Et je savais que le reste de mon roman raconterait les évènements qui ont conduit à cette fameuse journée. Dès lors, l’idée de faire de la journée du 16 août le fil conducteur autour duquel s’agrègeraient les souvenirs de Simone m’a paru être une bonne décision.

Pouvez-vous nous parler de la construction de l’histoire ? S’est-t-elle imposée, l’avez vous retravaillée ?

J’ai débord écrit un premier jet pendant environ un an. Ce premier jet a constitué une sorte de plan très détaillé de mon roman. Mais c’était très long et cela manquait de tension. Ensuite, j’ai tout repris, tout réécrit. J’ai beaucoup coupé. J’ai scindé mon histoire en chapitres que j’ai voulu courts et percutants. Je voulais garder le lecteur en haleine, qu’il ait envie de connaître la suite de l’histoire. 

Pouvez-vous nous parler de la fin ? L’avez vous envisagé dès le début ? Avez-vous envisagé de raconter ce que vivait votre protagoniste après ?
Je connaissais la fin dès le début. Je voulais que mon roman se termine au moment où la photo a été prise. Je n’ai jamais envisagé de raconter la suite car justement, ce qui m’intéressait était de raconter les évènements qui ont conduit à la scène de la photo. 

Comment avez vous trouvé une éditrice ?
J’ai participé à un atelier organisé par le magazine « Lire magazine littéraire » intitulé « Tout savoir avant d’envoyer son manuscrit à un éditeur ». Cet atelier de 3h, en distanciel, m’a permis de travailler la présentation formelle de mon manuscrit ainsi que ma lettre d’intention. A la fin de l’atelier, le formateur, qui avait lu les premières pages de chaque manuscrit, a donné à chacun d’entre nous des noms d’éditeurs dont la ligne éditoriale lui semblait correspondre avec notre texte. J’ai suivi ses conseils et la première éditrice dont il m’avait parlé m’a recontactée après l’envoi de mon manuscrit.

Le manuscrit de « Vous ne connaissez rien de moi » de Julie Héraclès

Avez-vous beaucoup retravaillé le livre après acceptation par la maison d’édition ?
Le principal travail a été un travail de coupe. Mon éditrice trouvait que mon texte était trop long. Elle m’a indiqué que le fait de couper permettrait de muscler le texte. Mon manuscrit initial comptait 700.000 signes. Une fois le travail de coupe terminé, il en comptait 600.000. 

Autre changement : le temps de mon récit. Mon éditrice m’a indiqué que, parfois, le fait de mêler les temps du présent et du passé, pouvaient perdre le lecteur. J’ai alors pris la décision de mettre l’intégralité de mon texte au présent de narration. Je trouve qu’ainsi, mon roman a gagné en énergie. 

Pouvez-vous nous parler de ce travail de réécriture ?

Cela n’a pas été facile pour moi de couper, de me dire que je pouvais enlever des scènes entières sans dénaturer mon récit. Et je manquais de recul sur mon texte. Je ne voyais plus vraiment ce que je pouvais retirer. Mon éditrice m’a alors pointé tous les passages qui lui semblaient non essentiels. J’ai suivi la plupart de ses conseils. Et qui dit coupe, dit aussi travail de réécriture pour que la cohérence entre les différentes scènes soit toujours de mise. Au total, ce travail a duré huit mois.  

Avez-vous d’autres projets, après ce 1er roman ?
Oui, il y a un thème qui me travaille depuis quelque temps. Il faut que je l’explore afin de savoir si je peux imaginer une histoire prenante autour de ce thème et peut-être écrire un deuxième roman…

Pouvez-vous nous parler de l’acquisition des droits cinématographiques de « Vous ne connaissez rien de moi » ? Qu’en espérez vous ?

Il y a quelques mois, mon éditrice m’a appelée pour me dire qu’un producteur souhaitait acheter les droits audiovisuels de mon roman afin d’en faire un film. Je ne pouvais pas le croire, c’était tellement inattendu. Le livre n’était pas encore sorti ! 

Aujourd’hui, je suis très émue d’imaginer qu’un jour prochain, il y aura des comédiens, une équipe de tournage dans les rues de Chartres. 

Quel serait votre conseil à des apprentis auteurs travaillant sur leur premier roman ?
Il y a beaucoup de conseils qui me viennent à l’esprit. S’il faut n’en retenir qu’un, je dirais que le choix du sujet est fondamental. Il va déterminer toute la suite. Et avant toute chose, il faut aimer son sujet, pour ensuite être capable de travailler dessus pendant plusieurs années, sans se lasser.

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