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Pourquoi la littérature développe l’empathie ?

Et si la littérature était la clé pour comprendre et ressentir ce que d’autres vivent, ou au contraire, un doux mensonge qui nous endort dans une fausse empathie ? Dans un monde obsédé par l’individualisme, lire est-il l’acte le plus subversif ? Découvrez pourquoi la littérature développe l’empathie, malgré les critiques qui l’accusent de manipulation émotionnelle.


La littérature, en tant qu’art narratif, a toujours eu le pouvoir singulier de nous immerger dans les pensées, les émotions et les vies des autres. En feuilletant un livre, nous accédons à des mondes inconnus, et surtout à des perspectives diverses qui façonnent notre compréhension de l’autre. Pourtant, il fut un temps où certains philosophes de l’Antiquité grecque, comme Platon, considéraient la littérature, et notamment la poésie, comme un danger pour l’âme.

Dans « La République », Platon exprime sa méfiance envers la capacité des œuvres littéraires à manipuler les émotions et à saper la rationalité. Cependant, au fil du temps, l’idée que la littérature nous éloigne de la vérité rationnelle a été contredite par un autre fait : son incroyable potentiel à nous enseigner l’empathie.

Le rejet de la littérature par les Grecs : une méfiance envers l’émotion

Platon et d’autres philosophes de la Grèce antique percevaient la littérature, et plus particulièrement la fiction, comme une menace pour la raison. Ils considéraient que la poésie et les histoires détournaient les citoyens de la quête de la vérité en jouant sur leurs émotions plutôt que sur leur rationalité. En plaçant l’accent sur les passions humaines, les récits littéraires risquaient, selon eux, d’induire des comportements irrationnels. La littérature, en éveillant des émotions telles que la tristesse ou la colère, éloignait les lecteurs de la maîtrise de soi, essentielle pour atteindre la sagesse.

Pour Platon, le poète ou l’écrivain n’était qu’un imitateur de la réalité, créant des simulacres éloignés de la véritable essence des choses. En introduisant les lecteurs à des émotions et à des personnages fictifs, il les privait de la connaissance authentique.

Pourtant, c’est précisément cette capacité à « imiter » les émotions humaines, à les incarner à travers des personnages, qui fait de la littérature un puissant outil de compréhension de l’autre.

Le pouvoir du point de vue narratif : une école de l’empathie

L’un des mécanismes les plus puissants de la littérature est l’utilisation du point de vue. À travers la narration, les auteurs nous invitent à habiter temporairement la conscience d’un autre être, à voir le monde à travers ses yeux. Que ce soit un personnage fictif ou réel, la littérature nous pousse à comprendre ses dilemmes, ses conflits intérieurs, ses souffrances et ses espoirs.

L’écrivain islandais Jón Kalman Stefánsson, dans son interview pour Les Artisans de la Fiction, décrit cette puissance du récit littéraire. Pour lui, « les histoires permettent de comprendre qui nous sommes, d’où nous venons et où nous devons aller. »

Les récits, en nous transportant dans l’intériorité des personnages, nous permettent de poser un autre regard sur les réalités humaines qui nous échappent souvent dans notre quotidien. « C’est une école de l’empathie absolue », affirme Stefánsson. En se plongeant dans l’histoire d’un autre, nous nous entraînons à ressentir ce que ressent l’autre, à comprendre ce qui, en temps normal, pourrait nous sembler étranger ou incompréhensible.

De la même manière, Olivier Adam souligne dans son interview que la littérature nous pousse à « penser contre soi-même ». En lisant, nous élargissons notre prisme de compréhension. Olivier Adam évoque l’importance de vivre « mille vies en plus de la sienne », une idée qui résonne avec la manière dont la littérature nous expose à des situations, des environnements et des états d’esprit qui nous sont inconnus. Ce processus, qui nous confronte à des pensées contradictoires et des perspectives opposées, nous oblige à sortir de notre propre cadre mental pour entrer dans celui d’un autre.

L’effet de la lecture sur l’empathie

Plusieurs études contemporaines ont prouvé ce que les écrivains pressentaient depuis longtemps : la lecture de fictions stimule l’empathie. En explorant les pensées et les émotions des personnages, le lecteur active les mêmes zones du cerveau que lorsqu’il observe quelqu’un en situation réelle. Les neuroscientifiques appellent cela les « neurones miroirs« , qui se déclenchent lorsque nous observons une action ou une émotion, comme si nous la vivions nous-mêmes. La lecture de romans permet donc de « s’entraîner » à la compréhension d’autrui, un exercice particulièrement bénéfique dans une société où l’individualisme peut parfois éloigner les gens.

Dans un monde hyperconnecté, la littérature conserve une vertu essentielle : elle nous permet de ralentir, de réfléchir et d’entrer en communion avec des univers étrangers aux nôtres. En nous invitant à éprouver les sentiments des autres, elle développe notre capacité à ressentir et à comprendre des expériences de vie très différentes des nôtres.

Cela a des conséquences non seulement sur nos relations personnelles, mais aussi sur notre manière d’appréhender les enjeux sociaux et politiques.

L’importance de la diversité des voix dans la littérature

La diversité des perspectives offertes par la littérature contemporaine nous expose à une pluralité de réalités. À travers ses récits, la littérature nous enseigne que chaque expérience humaine est unique, mais qu’elle est aussi connectée à une humanité universelle. Olivier Adam, dans ses romans, s’attache à représenter les vies ordinaires de gens souvent oubliés ou marginalisés. Il cite Raymond Carver comme une influence majeure, un auteur qui s’intéressait à la vie des travailleurs, des déclassés, des gens ordinaires.

Olivier Adam explique que ses personnages sont des « frères », et non des figures héroïques ou distantes. En offrant aux lecteurs une plongée dans le quotidien de personnages éloignés de leurs propres réalités, il les pousse à adopter une attitude de compréhension plutôt que de jugement.

Jón Kalman Stefánsson, quant à lui, explore la condition humaine dans des environnements souvent rudes et isolés, comme l’Islande rurale. Ses personnages sont façonnés par des éléments naturels et sociaux qui conditionnent leurs actions, mais l’auteur s’attache à les montrer dans leur pleine humanité. Le lecteur, plongé dans ces vies, est amené à ressentir leurs doutes et leurs espoirs, à se confronter à leurs propres limites tout en élargissant leur horizon émotionnel.

Conclusion : La littérature, un miroir de l’humanité

Si Platon voyait dans la littérature une menace pour la rationalité, nous devons aujourd’hui la percevoir comme une alliée pour mieux comprendre l’autre. Loin d’être une simple distraction, la fiction est un puissant levier pour cultiver l’empathie. En nous transportant dans des réalités différentes, elle nous apprend à ressentir et à comprendre les autres, à nous connecter à une humanité partagée.

Comme l’a souligné Olivier Adam, la littérature est une école de l’empathie. Elle ne fait pas que raconter des histoires ; elle nous permet de vivre, à travers les mots, la vie d’autrui, et ce faisant, elle nous rend plus conscients des réalités qui nous entourent. En lisant, nous apprenons à voir le monde à travers d’autres prismes, à éprouver des émotions qui nous étaient étrangères, et finalement, à devenir plus humains.

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