Comment un concepteur-rédacteur en publicité, sans formation universitaire en littérature, est-il devenu un écrivain reconnu dans le monde du polar et du roman noir, jeunesse et adultes ? André Marois nous livre un témoignage puissant sur la détermination, la persévérance et l’artisanat d’apprendre à raconter des histoires.
Introduction
André Marois, écrivain québécois d’origine française, est une figure emblématique du roman noir et du polar jeunesse et adultes. Né le 21 mars 1959 à Créteil, il s’installe à Montréal en 1992, où il entame une carrière prolifique d’écrivain après avoir travaillé comme concepteur-rédacteur publicitaire. Sans formation en littérature, il a su tracer son chemin dans le monde de l’écriture grâce à une détermination sans faille, une pratique assidue et une observation aiguisée de son environnement.
Dans une interview exclusive accordée aux Artisans de la Fiction, durant Quais du Polar 2024, André Marois revient sur son parcours atypique, sa méthode de travail, ses influences, et livre des conseils précieux aux écrivains débutants.
Apprendre à écrire en écrivant : un parcours autodidacte
La formation initiale d’André Marois en arts plastiques, cinéma et publicité l’a certes familiarisé avec le processus créatif et le pouvoir des images et des mots, mais c’est par la pratique de l’écriture qu’il a véritablement forgé son style et sa voix.
« Je me suis formé à la narration en écrivant. C’est un peu basique, mais c’est la réalité. »
Les débuts : les nouvelles comme laboratoire d’écriture
Son entrée dans le monde de l’écriture s’est faite par le biais des nouvelles. Ce format court lui a permis d’expérimenter, de tester des idées, des styles, des voix narratives sans s’engager dans la longue haleine d’un roman.
« J’écrivais des nouvelles assez courtes, des nouvelles noires, et j’ai commencé à écrire quand je suis arrivé à Montréal. C’est vraiment le Québec qui m’a ouvert l’esprit. C’est là où je me suis senti comme si j’avais un espace de liberté qui s’ouvrait, comme si j’avais la permission d’écrire. »
Cette sensation de liberté et d’inspiration renouvelée a été le catalyseur de sa carrière d’écrivain. Montréal est devenue non seulement son lieu de résidence, mais aussi une source inépuisable de personnages, de décors et d’intrigues.
La persévérance face aux obstacles : trois romans pour être publié
Le chemin vers la publication est souvent semé d’embûches, et André Marois n’a pas échappé à cette réalité. Malgré son enthousiasme et son engagement, ses deux premiers romans n’ont pas trouvé preneur auprès des éditeurs.
« J’ai écrit un premier roman assez court, que j’ai envoyé à des éditeurs… personne n’en a voulu. Mais j’avais commencé à écrire, j’avais la piqûre. J’ai écrit un deuxième roman… personne n’a voulu le publier non plus. »
Au lieu de se décourager, il a vu ces refus comme une opportunité de se remettre en question, d’affiner son style et de persévérer.
« J’ai écrit un troisième roman, et c’est finalement ce troisième roman qui a été publié. »
Ce troisième roman, « Accidents de parcours », publié en 1999, a marqué le début de sa reconnaissance en tant qu’écrivain. Il a été classé parmi les dix polars québécois incontournables, sélectionnés par le magazine Québec français du printemps 2006.
L’apprentissage par l’échec
Les refus des éditeurs ont été pour André Marois une école de l’humilité et de la persévérance. Ils lui ont permis de comprendre les exigences du marché éditorial et d’adapter sa démarche.
« Mon apprentissage, c’est vraiment la pratique, l’écriture. J’aime bien essayer les choses, j’aime bien qu’on me donne des défis. »
Cette attitude proactive et ouverte aux défis a été déterminante dans sa réussite ultérieure.
La discipline de l’écriture : une routine essentielle
Pour André Marois, l’écriture n’est pas seulement une passion, c’est aussi un travail qui nécessite rigueur et discipline. Il insiste sur l’importance d’une pratique régulière pour progresser et développer son art.
« Il ne faut pas écrire quand ça nous prend. Il faut vraiment écrire, il faut une discipline. »
Puiser dans le quotidien : l’observation comme source d’inspiration
L’une des forces de l’écriture d’André Marois réside dans sa capacité à observer le monde qui l’entoure et à en extraire des éléments pour ses récits. Il encourage les écrivains à être attentifs à leur environnement immédiat.
« Ma façon de travailler, c’est de m’inspirer du quotidien. Ouvrir les yeux, ouvrir les oreilles, prendre des notes, engranger du matériel. »
Les personnages : un reflet de son entourage
Ses personnages sont souvent inspirés de personnes réelles, ce qui leur confère une authenticité et une profondeur particulières.
« J’ai besoin de partir de quelqu’un que je connais, même si je le transforme. J’ai écrit des romans où j’ai vraiment pris mes enfants comme personnages principaux. »
Cette méthode lui permet de créer des personnages crédibles, avec des réactions et des émotions réalistes, ce qui renforce l’engagement du lecteur.
Les règles du genre : respecter et réinventer les codes
En tant qu’écrivain de romans noirs et policiers, André Marois est conscient des codes inhérents au genre. Il les utilise comme une structure de base, tout en y apportant sa touche personnelle.
« Pour moi, la règle que je me suis fixée, c’est de rentrer dans la tête du coupable et d’essayer de comprendre pourquoi il veut commettre un crime. »
Adapter le genre au public cible
Il adapte également son écriture en fonction du public auquel il s’adresse. Pour les adultes, il explore la psychologie des criminels, tandis que pour les jeunes, il privilégie l’enquête et le mystère.
« Pour les jeunes, j’écris des romans d’enquête plus traditionnels, généralement avec des enfants ou des adolescents qui mènent l’enquête. »
Cette flexibilité lui permet de toucher un large éventail de lecteurs tout en restant fidèle à son style.
L’avenir de la narration face à l’intelligence artificielle
Interrogé sur l’impact potentiel de l’intelligence artificielle (IA) sur la création littéraire, André Marois exprime une vision nuancée.
« Je ne suis pas vraiment inquiet. Il y a sûrement des livres qui vont sortir, qui sont complètement formatés et prédigérés et écrits par un ordinateur, mais ça ne va pas empêcher les écrivains de continuer à inventer des histoires. »
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