Laurence Neel, élève des Artisans de la Fiction, vient de publier un recueil de nouvelles chez l’éditeur Jacques Flament. Elle nous explique son processus d’écriture et les difficultés qu’elle a rencontrées !
– Combien de temps avez-vous travaillé sur votre recueil de nouvelles ?
Ce travail m’a pris deux ans. Au départ j’avais des textes épars, des ébauches, des premiers jets qui n’avaient pas forcément de lien entre eux. Certains textes avaient été écrits depuis plusieurs années, parfois dans le cadre des ateliers suivis au Artisans de la Fiction, mais je ne trouvais pas le temps nécessaire pour les retravailler en profondeur. Je dois dire que la période du confinement pendant laquelle je me suis retrouvée au chômage partiel pendant plusieurs mois m’a bien aidée à mener à bien mon projet.
– Était-il conçu dès le départ comme un recueil de nouvelles ?
Au départ, je n’avais pas imaginé rassembler ces textes dans un recueil. Lorsque j’ai eu une dizaine de textes tous très différents les uns des autres, s’est alors posée la question du recueil.
En prenant conseil auprès d’une agente littéraire, elle a mis en évidence la nécessité d’avoir un fil conducteur : soit par le biais d’un personnage, soit par le biais d’un objet qui relierait les nouvelles entre elles.
– Comment avez-vous procédé pour l’écriture des nouvelles ? -Avez-vous beaucoup réécrit ?
Pour chacune d’entre elles, j’ai suivi la méthode enseignée aux Artisans de la Fiction : la construction de la matrice du personnage principal, de la voix du personnage, de l’antagoniste. Après avoir élaboré une idée d’histoire que j’ai déployée en 3 phases principales qu’on appelle Début – Milieu – Fin, j’ai continué à creuser les failles de mes personnages et surtout définir leur but/objectif qui doivent être très clairs pour l’auteur.
J’ai énormément réécrit : pour clarifier certains passages, pour en alléger d’autres qui n’apportaient pas d’éléments significatifs faisant avancer l’histoire. J’ai passé aussi beaucoup de temps sur le travail de fignolage (éliminer les répétitions, se questionner sur le choix de certains mots, supprimer les mots clichés, etc).
– Comment avez vous structuré l’ensemble ?
Grâce aux conseils dont j’ai bénéficié mais aussi aux bêta lecteurs (dont certains sont élèves aux Artisans de la fiction – je les remercie une nouvelle fois ici pour leur relecture ) j’ai pu améliorer la cohérence de mes histoires, leur donner du rythme quand elles en manquaient. Le personnage commun à toutes les nouvelles, Léa Laroche, sage-femme et voyante, est apparu assez rapidement. Ensuite, pour quasiment chaque nouvelle, je lui ai fait jouer un rôle parfois essentiel parfois secondaire. Elle est très présente dans le recueil et elle entretient des liens avec tous les autres personnages, bien que très différents les uns des autres. C’est elle qui les relie en quelque sorte.
– Est-ce que la formation que vous avez suivie aux Artisans vous a aidé ? Sur quels points ?
C’est indéniable. J’en veux pour preuve que je tente des concours de nouvelles depuis 2013. Cette année là, j’ai obtenu le 1er prix d’un concours organisé par l’association des Paralysés de France. Le format n’était pas celui de la nouvelle mais celui d’un texte de forme libre.
Par la suite, j’ai renouvelé l’expérience avec des concours de nouvelles mais invariablement mes textes n’étaient pas retenus . Tout simplement parce qu’il n’y avait pas d’histoire. Je me suis alors renseigné sur les techniques de la nouvelle en participant à un forum d’auteurs en ligne appelé Mauxd’auteurs. Des auteurs chevronnés multi primés et d’autres débutants, comme moi à l’époque, s’y côtoyaient. J’ai participé à plusieurs jeux d’écriture mais là encore, mes textes manquaient de structure. Puis j’ai proposé à un auteur du forum de participer ensemble à un concours de nouvelles en duo. Il m’a « coaché » pendant 5 mois. Nous avons co-écrit jusqu’à 8 versions d’une nouvelle qui a été primée et qui figure dans un ouvrage collectif.
Une fois le concours passé, j’ai essayé dans mon coin de rassembler les conseils qu’il m’avait prodigué pendant ce travail commun mais il me manquait théorie et structure. Un collègue Correspondant de Presse m’a parlé des Artisans de la Fiction. C’était en 2017 – depuis lors je n’ai cessé de me former. J’achève cette année le parcours avec le Writing Boot Camp pour un embryon de roman.
Jamais je n’aurai abouti quelconque manuscrit si je n’avais eu une solide formation telle que celle des Artisans car les formateurs nous apprennent à décortiquer les histoires, à comprendre comment elles sont construites et ce qui fait qu’elles fonctionnent. Nous nous inspirons des modèles que nous apprécions en tant que lecteurs. Cela nécessite une vraie implication en tant qu’élève et pas mal de travail mais qui peut réussir sans travail ?
– Beaucoup d’éditeurs disent ne pas être intéressés par des recueils de nouvelles, comment avez vous surmonté cela ?
J’ai adressé mon manuscrit complètement révisé et mis en page par une correctrice professionnelle à l’éditeur indépendant JACQUES FLAMENT car je sais qu’il est intéressé par les recueils de nouvelles. J’en avais déjà lus plusieurs parmi ceux qu’il édite.
En 2018, j’ai eu l’occasion de participer à un ouvrage collectif initié par l’éditeur sur le thème « une image – un texte » à partir de photos noir et blanc de la photo reporter américaine Dorothea Lange (prises majoritairement pendant la Grande Dépression).
– Participez-vous régulièrement à des concours d’écriture ? Pour quelles raisons ?
Oui dès que j’ai du temps à y consacrer. Durant les deux dernières années j’ai pu participer à deux concours. Cela me permet d’entretenir les outils et les techniques à mettre en œuvre dans ce type d’écrit. En effet, la nouvelle est très codifiée du point de vue de la technique. C’est ce qui rend l’exercice difficile.
– Un conseil d’écriture pour ceux et celles qui se lancent dans l’écriture de nouvelles ?
Apprendre les techniques et les outils de la narration littéraire qui permettent de se lancer véritablement dans l’écriture d’histoires de fiction et notamment les nouvelles. Ne pas craindre de recommencer encore et encore, de prendre le temps de travailler ses textes en profondeur en plusieurs versions successives et de se frotter aux concours pour s’exercer.