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Donner envie au lecteur de dévorer le livre : M. J. Arlidge


Certains livres vous happent. Vous les commencez en fin d’après-midi, vous dites “encore un chapitre”… et avant de vous en rendre compte, il est deux heures du matin. Que s’est-il passé ? Est-ce seulement le talent de l’auteur ? Une alchimie mystérieuse ? Ou existe-t-il des techniques concrètes pour captiver le lecteur dès la première page et ne jamais le relâcher ?

« Ce que je cherche, c’est une histoire qui vous transporte complètement et qui ne vous lâche plus. »

Dans cette interview exclusive pour Les Artisans de la Fiction, M. J. Arlidge, auteur britannique de thrillers traduits dans plus de trente langues, nous partage sa méthode : une approche narrative centrée sur l’efficacité, l’émotion et l’art du cliffhanger. 

1. Le plaisir de lecture avant la qualité littéraire

Contre une certaine tradition du roman littéraire — celle du style, de la lenteur, du souci de la phrase parfaite — Arlidge revendique une forme d’écriture fonctionnelle. Le style, dit-il, n’est pas une fin en soi. Il est au service de la narration.

« Le plus important n’est pas forcément d’avoir une prose de la plus grande qualité. C’est de savoir comment raconter une histoire complètement captivante. »

Pour Arlidge, il faut penser l’écriture du point de vue du lecteur. Qu’est-ce qui le pousse à tourner les pages ? Ce n’est pas l’élégance du style, mais la tension dramatique, la curiosité, l’identification.

2. Chapitres courts, cliffhangers puissants : la structure comme moteur

Arlidge adopte une structure fragmentée et rythmée, directement héritée de son expérience en télévision.

« J’ai appris à la télévision, sur EastEnders. Il y avait toujours six intrigues et un gros cliffhanger à la fin. »

Ce qu’il faut retenir :

  • Chapitre court = rythme : un chapitre court donne une impression de rapidité. Il rend la lecture fluide, énergique.
  • Cliffhanger = tension : chaque fin de chapitre doit poser une question, une attente, un doute. Le lecteur n’a pas le choix : il continue.

Conseil pour les auteurs : relisez la dernière phrase de chaque chapitre. Est-elle suffisamment intrigante pour provoquer l’envie de lire le suivant ?

3. Penser comme un scénariste : un synopsis avant tout

Loin du mythe de l’écrivain inspiré, Arlidge travaille à partir d’un synopsis très précis, parfois écrit intégralement avant de rédiger une seule ligne.

« J’écris un synopsis, avec tous les chapitres détaillés. Je sais exactement ce qui se passe dans chaque scène. »

Ce travail en amont a deux fonctions pédagogiques majeures :

  • Sécuriser l’auteur : savoir où l’on va permet d’écrire plus vite, avec moins d’angoisse.
  • Renforcer la structure : cela évite les creux narratifs, les ralentissements, les faiblesses de deuxième acte.

4. Le lecteur aime avoir peur (et il aime être surpris)

L’un des moteurs de lecture les plus puissants est la peur sans risque. Arlidge utilise cette émotion comme une drogue narrative.

« Les gens aiment avoir peur. C’est une bonne chose qu’ils aiment ça. Sinon, je n’aurais pas de travail. »

Mais cette peur n’est pas gratuite. Elle repose sur une construction rigoureuse du suspense. Il faut un crime dérangeant, une victime vulnérable, un tueur imprévisible, et surtout des personnages auxquels on tient.

« Si les personnages ne vous intéressent pas, il n’y a pas de suspense. On se fiche de savoir s’ils vivent ou s’ils meurent. »

Principe narratif fondamental : il n’y a pas de tension sans attachement. L’émotion vient du lien entre le lecteur et les personnages, pas de l’événement en lui-même.

5. Recherches, observations, idées : nourrir la fiction avec le réel

Arlidge puise dans la réalité pour enrichir ses fictions. Il parle avec des traducteurs, lit des articles, observe les gens.

« Tout le monde a une histoire, une tragédie, un traumatisme, un conflit. Vous êtes toujours à la recherche de personnages. »

Et parfois, une idée naît d’un détail vu dans la rue ou d’une recherche sur les prisons pour femmes — qui révèle alors des dimensions sociales et humaines inattendues.

Conseil aux auteurs : commencez par la documentation. Elle n’enrichit pas seulement le décor — elle fait souvent émerger des thématiques profondes qui donnent du sens à l’histoire.

6. L’importance du premier jet (même imparfait)

« Tant que vous n’avez pas toute l’histoire, vous n’avez rien. »

Arlidge insiste sur la nécessité d’écrire, même mal, même brouillon. Le premier jet, dit-il, est de l’argile brute. Ce n’est pas une œuvre, c’est un matériau.

« Personne ne verra jamais votre premier jet. Donc faites-le. Écrivez. C’est tout. »

Pour les écrivains débutants : ne visez pas la perfection du premier coup. Visez l’achèvement. Un manuscrit terminé est transformable. Un projet dans la tête ne sert à rien.

7. Écrire ce qu’on aime lire

« Écrivez un livre que vous aimeriez lire. Si vous vous faites plaisir, d’autres vous suivront. »

Ce conseil simple résume une éthique de l’écriture : ne pas suivre les tendances, mais rester fidèle à ce qui vous enthousiasme. La sincérité narrative est perceptible. L’enthousiasme est contagieux.

Conclusion

Donner envie au lecteur de dévorer un livre n’est pas un art mineur. C’est un travail d’ingénierie narrative, mêlant structure, rythme, émotion et audace. M. J. Arlidge en offre un modèle pédagogique : un thriller n’est pas un “genre bas”, mais un exercice de tension dramatique et d’efficacité émotionnelle — qui n’exclut ni la profondeur, ni l’ambition.

Ce que cette interview nous apprend ? Ce n’est pas la qualité de la prose qui fait qu’un livre est lu… mais la qualité de la lecture qu’il propose.

Vous désirez apprendre à écrire des histoires qui donnent envie au lecteur de dévorer le roman ? Nous vous recommandons nos formations suivantes : 

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