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Écrivain jardinier ou architecte ?


Écrivain jardinier ou écrivain architecte : l’éternel duel qui déchire le monde littéraire. Faut-il laisser son récit pousser au gré du vent ou le bâtir pierre par pierre ? Tandis que certains auteurs prônent la spontanéité créative, d’autres défendent la rigueur méthodique. Mais laquelle de ces approches mène réellement à aboutir un roman, et laquelle conduit à l’impasse ?


La littérature est un champ de bataille où s’affrontent deux conceptions de l’écriture : celle de l’écrivain jardinierqui sème ses idées et laisse ses personnages croître au gré du vent, comme le revendique Stephen King dans « Écriture », et celle de l’écrivain architecte, qui bâtit son roman comme un édifice, avec des plans détaillés et une structure solide, comme Jonathan Coe. Mais laquelle de ces approches est la plus efficace pour captiver le lecteur et produire une œuvre mémorable ? À travers les témoignages exclusifs de cinq auteurs francophones recueillis par Les Artisans de la Fiction, plongeons au cœur de ce débat passionné.

L’écrivain architecte : la maîtrise de la structure

Bertrand Puard , prolifique  romancier adultes et jeunesse, incarne parfaitement l’écrivain architecte. Pour lui, la littérature doit « raconter des histoires qui font sens ». Afin de maintenir l’intérêt du lecteur, il confie :

« J’ai tendance à vraiment travailler énormément mes intrigues et mon chapitrage avant de me mettre à l’écriture. Je travaille avec des tableurs Excel […] pour essayer de voir si tout est bien équilibré ».

Cette rigueur n’est pas sans rappeler celle d’Alexandre Dumas, qu’il admire pour sa « maîtrise du suspense inouïe ». Bertrand Puard souligne l’importance de la préparation :

« C’est vraiment une préparation. Et puis, bon, après, pour maintenir le suspense, je pense que pour se lancer dans ce genre de littérature, il faut en avoir déjà beaucoup lu ».

Bernard Minier, auteur de thrillers, partage cette vision.

« Je prépare tout en amont avant même d’écrire la première ligne », affirme-t-il. Il compare le roman à un iceberg : « Il y a ce qui est au-dessus de la surface […] et il y a tout ce qui est en dessous […] toute la documentation que j’ai pu accumuler ».

Pour Minier, cette préparation minutieuse est une responsabilité envers le lecteur : « Le lecteur nous fait confiance […] il faut qu’on sache de quoi on parle ».

Mo Malo, également auteur de polar, embrasse également le rôle de l’architecte. Bien qu’il apprécie l’hybridation des genres et l’originalité, il admet :

« Moi, j’ai répondu plutôt architecte tendance parce que je structure au maximum ».

Il insiste sur l’importance d’être totalement investi : « Il faut être totalement immergé dans son truc ».

L’écrivain jardinier : la spontanéité créative

À l’opposé, Marc Levy revendique une approche plus organique. « Écrire, c’est entrer sur un chemin de liberté », déclare-t-il. Refusant de se conformer aux codes, il affirme :

« Ce qui est la seule chose que j’aime, c’est écrire un livre dans un genre en ne me servant d’aucun code de ce genre ».

Pour Levy, l’écriture est une aventure où l’imperfection et la spontanéité priment sur la perfection méthodique.

Kenan Görgün, romancier belge d’origine turque, partage cette philosophie. Ayant commencé à écrire avant même de lire, il s’est formé de manière empirique.

« Je me suis formé, je pense, en écrivant », confie-t-il. Peu concerné par les règles du genre, il écrit de manière instinctive : « Je ne les ai jamais vraiment apprises à part de manière très instinctive, intuitive. Et j’écris tout ce que j’écris de la même manière ».

Le choc des approches : rigueur contre liberté

Les écrivains architectes défendent la nécessité d’une structure solide pour guider le lecteur à travers une intrigue maîtrisée. Leur méthode garantit une cohérence narrative et une progression réfléchie des événements. Cependant, cette rigueur peut parfois étouffer la créativité et conduire à des œuvres prévisibles si elle est appliquée de manière trop rigide.

Les écrivains jardiniers, en revanche, prônent la liberté créative et la découverte au fil de l’écriture. Cette spontanéité peut engendrer des œuvres surprenantes, riches en émotions authentiques. Mais elle comporte aussi le risque de s’égarer, de perdre le fil conducteur et de laisser le lecteur déconcerté.

L’hybridation des genres : un terrain d’entente ?

Malgré leurs différences, tous s’accordent sur l’importance de l’originalité et de l’hybridation des genres. Bertrand Puard aime « prendre ces règles et les distordre », cherchant à « mélanger les genres » pour offrir une expérience originale au lecteur.

Mo Malo voit dans l’hybridation un moyen de « casser les codes et proposer autre chose ».

Cette quête d’innovation témoigne d’une volonté commune de dépasser les conventions pour surprendre et captiver le lecteur, qu’on soit jardinier ou architecte.

L’importance des fondations : la formation comme socle commun

Au-delà de leurs méthodes, ces auteurs reconnaissent l’importance d’avoir de solides bases. Bertrand Puard insiste sur la nécessité d’avoir « beaucoup lu » et d’analyser comment les grands auteurs tiennent le lecteur en haleine.

Bernard Minier conseille aux débutants d’être exigeants et de se méfier des premières idées, souvent clichées : « Cherchez une idée encore meilleure […] jusqu’à ce que vous ayez l’idée avec un I majuscule ».


Marc Levy admet que « l’écriture est un métier qui s’apprend », même s’il prône la liberté et la spontanéité. Kenan Görgün encourage à « écrire beaucoup » et à « aller jusqu’au bout », soulignant l’importance de la pratique et de la persévérance.

Conclusion : Au-delà du débat, la passion de l’écriture

Le débat entre écrivain jardinier et écrivain architecte reflète des visions différentes de la création, mais il ne doit pas occulter l’essentiel : la passion pour l’écriture et le désir de partager des histoires qui touchent les lecteurs. Qu’ils planifient chaque détail ou qu’ils se laissent porter par leur inspiration, les auteurs s’accordent sur la nécessité de travailler leur art, de se former et de toujours chercher à s’améliorer.

En fin de compte, l’écriture est un voyage personnel où chaque auteur trace sa propre route. Ce qui importe, c’est la qualité du récit et l’émotion transmise au lecteur. Et pour y parvenir, il n’y a pas de chemin unique, mais une multitude de voies où rigueur et liberté peuvent coexister harmonieusement.

Que vous soyez plutôt écrivain jardinier ou architecte, si vous désirez vous former, nous vous recommandons les formations suivantes :

 

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