La littérature policière contemporaine connaît une évolution fascinante grâce à des auteurs qui repoussent les limites du genre. Parmi eux, Christos Markogiannakis se distingue par une approche unique qui fusionne la criminologie, le droit, l’histoire de l’art et la narration. Né en 1980 à Héraklion, cet ancien avocat pénaliste et criminologue grec a su transformer son expertise en une source inépuisable de créativité littéraire.
L’Importance de raconter des histoires
Interrogé sur le but de la littérature, Christos affirme :
« C’est l’objectif de la littérature, bien sûr, de raconter des histoires, mais en même temps de décrire notre société, décrire notre temps et partager les sentiments, partager nos vécus. C’est aussi une sorte de catharsis. »
Pour lui, la narration va au-delà du simple divertissement. Elle est un moyen d’explorer et de comprendre le monde, de partager des expériences humaines universelles et de permettre tant à l’auteur qu’au lecteur de vivre une forme de catharsis.
Des modèles littéraires ancrés dans la tradition et l’innovation
Christos puise son inspiration dans un héritage riche et diversifié :
« Il y a un premier héritage qui est mon héritage grec. J’ai grandi avec la mythologie, les mythes fondateurs qui ont tout raconté, qui ont tout dit. […] Et puis, il y a les femmes écrivains de romans policiers, des énigmes policières comme je les aime et comme je les écris, comme Agatha Christie. »
Cette combinaison de mythologie grecque, de tragédie classique et de romans policiers modernes lui permet de créer des œuvres qui sont à la fois profondément enracinées dans la tradition et résolument contemporaines.
Formation à la narration par la pratique juridique
Son expérience en tant qu’avocat pénaliste a grandement influencé sa manière de construire ses récits :
« Il fallait convaincre [un jury], et pour les convaincre, il fallait inventer des histoires et raconter des histoires avec des arguments solides. […] C’est mon travail d’avocat pénaliste qui m’a beaucoup aidé à construire ma pensée et ma façon de raconter. »
La nécessité de présenter des arguments convaincants devant un jury l’a aidé à développer une narration précise, logique et persuasive, des compétences essentielles pour tout écrivain.
Les règles du récit de mystère
Concernant les conventions du genre policier, Christos souligne l’importance de connaître les règles pour mieux les transcender :
« Il faut bien connaître les règles pour pouvoir les casser après. […] Pour moi, ce sont les mêmes règles qu’on trouve dans la tragédie de Sophocle. C’est-à-dire un meurtre non élucidé, quelqu’un qui mène une enquête […], un cercle fermé de suspects, des indices, des retournements, des twists, et puis la réponse, la catharsis. »
Il établit un parallèle entre les récits policiers modernes et les tragédies grecques, mettant en lumière la structure universelle des histoires de quête de vérité et de justice.
L’hybridation des genres comme source d’équilibre
Christos n’hésite pas à mélanger les genres pour créer des œuvres uniques :
« Je voulais mélanger le côté noir de la psyché humaine […] avec quelque chose d’un peu plus lumineux et plus créatif qui est l’art. […] J’ai créé quelque chose qui s’appelle ‘Criminarts’ où je prends le lecteur par la main et on découvre ensemble des scènes de crimes dans les musées, et on explique ce qu’on voit sur les tableaux, les sculptures, les vases grecs de façon criminologique. »
Cette approche hybride permet d’explorer des thèmes complexes tout en offrant une expérience narrative riche et innovante.
Processus d’écriture : entre planification et spontanéité
Sur sa méthode d’écriture, il explique :
« Je connais la destination avant de commencer à écrire. Je connais déjà la fin. […] Mais après, j’envisage un peu l’écriture comme un petit voyage. Je connais la destination, je prends ma voiture, et je ne connais pas le chemin. »
Cette balance entre structure préétablie et liberté créative permet à ses personnages de prendre vie de manière organique, ajoutant de la profondeur et de l’authenticité à ses récits.
L’importance de la réécriture et de la persévérance
Christos insiste sur la nécessité de réviser son travail :
« J’écris, je réécris, je laisse à côté un peu le premier draft pour deux ou trois semaines. Après, je le reprends pour réécrire, corriger, voir si les choses fonctionnent. […] Parce qu’à partir d’un moment, il faut dire ‘basta’, parce que sinon on n’arrête jamais. »
Il conseille également aux auteurs débutants :
« Il faut lire, relire et écrire, écrire, écrire. […] Il faut d’abord être passionné par ce qu’on fait et écrire sur les choses qui nous passionnent. »
L’impact de l’intelligence artificielle sur la littérature
Face aux avancées technologiques, il reste optimiste quant à l’avenir de la littérature :
« Je ne suis pas du tout inquiet pour l’intelligence artificielle. […] La machine peut copier et imiter le style le plus beau, mais si les sentiments ne sont pas là, les lecteurs sensibles vont le comprendre. »
Il souligne l’importance de l’âme et de l’émotion dans la création littéraire, des éléments que la technologie ne peut reproduire.
Conclusion
L’approche de Christos Markogiannakis offre une perspective fascinante pour les étudiants en creative writing. En combinant une connaissance approfondie des structures narratives classiques avec une volonté d’innover et de mélanger les genres, il démontre comment la littérature peut être un puissant moyen d’explorer la condition humaine. Son travail illustre l’importance de la passion, de la persévérance et de l’authenticité dans le processus créatif.
Pour aller plus loin :
- Lire les œuvres de Christos Markogiannakis, notamment « Au 5e étage de la faculté de droit », « Mourir en scène », « Auteur de crimes » et « Qui a tué Lucy Davis ? ».
- Explorer le concept de « Criminarts », qui fusionne criminologie et histoire de l’art.
- Analyser la manière dont il intègre ses connaissances en criminologie dans ses récits, et comment cela enrichit la psychologie des personnages
Nous désirez vous former à l’artisanat de la narration ? Nous vous recommandons nos formations :