« Écrire un livre quel qu’il soit est extrêmement difficile »
Alexis Aubenque est un auteur français de space opera et de thriller. Il est économiste de formation. Il a inauguré en 2002 un cycle romanesque de science-fiction avec La Chute des mondes, space opera se déroulant au xxviie siècle dans une fédération galactique regroupant 250 mondes habités.
Depuis 2008, il a arrêté la science-fiction pour se lancer dans le domaine du thriller avec une première série intitulée River Falls, qui met en scène le shérif Mike Logan. En 2009, ce changement est récompensé par le prestigieux « prix Polar » du Salon Polar & CO de Cognac pour le second tome de la série River Falls.
Il enchaîne à partir de 2011 avec la série Nuits Noires à Seattle, qui met toujours en scène le shérif Logan mais de manière secondaire, et met en avant ses lieutenants Angelina Rivera et Dean Nelson déjà présents dans la première série.
En 2008, vous arrêtez la science-fiction pour vous lancer dans le thriller. Qu’est-ce qui a motivé cette décision ?
En fait, je suis quelqu’un de très éclectique dans mes goûts et, s’il est vrai que j’adore la science-fiction, j’aime tout autant le roman policier, le thriller, le fantastique et la littérature générale.
Il se trouve que bien souvent les éditeurs nous mettent dans des cases, et une fois qu’on nous colle une étiquette, il est très difficile de nous en séparer. J’avais, plusieurs fois, proposé des projets de thrillers, mais le déclic s’est produit quand mon éditrice au Fleuve Noir qui, ayant rejoint les éditions Calmann-Levy, m’a enfin proposé d’en faire un. J’ai sauté sur l’occasion et ne le regrette pas.
Techniquement, le Thriller est-il plus simple que la SF ?
De mon point de vue, écrire un livre quel qu’il soit est extrêmement difficile, et je ne saurais faire de différence.
Comment vous êtes vous formé à l’écriture de Thriller ?
En lisant énormément de romans, mais aussi en décortiquant les codes des séries télévisées du genre. En dernier lieu l’intrigue. Le fameux : qui, comment, pourquoi ?
Lorsque vous vous lancez dans le travail préparatoire d’un Thriller, par quoi commencez-vous : l’antagoniste ? Le protagoniste ? L’univers narratif ?
Tout d’abord, c’est le décor. Trouver un lieu, une ville qui me fasse rêver. Le désert du sud du Colorado pour « Canyon Creek ». L’Alaska pour « White Forest », Les iles du Pacifique pour » Stone Island »… Puis ce sont les personnages principaux. Et en dernier lieu l’intrigue. Le fameux : qui, comment, pourquoi ?
Vous avez commencé par la SF. Quels sont les principales différences, du point de vue de l’écriture, avec le Thriller ?
Les deux genres sont très différents dans la démarche. En premier lieu, il y a SF et SF ! C’est à dire qu’à l’inverse du Thriller qui est assez codifié, la SF ne l’est pas du tout, la seule règle étant que l’action se passe dans la futur… et encore !
Pour ma part, j’écrivais de la science-fiction tendance aventure, et la grosse différence avec le thriller, c’est que je n’étais pas obligé d’avoir un squelette très détaillé de mon histoire avant de l’écrire. Je me laissais souvent guidé par les personnages. J’avais juste en tête la fin du livre, mais je ne savais pas forcément comment y arriver. Les options s’ouvraient devant moi au fil de l’écriture je choisissais celle qui me semblait la plus adaptée.
En thriller, je suis obligé d’avoir quasiment le plan de mon histoire, car l’intérêt premier d’un thriller c’est la progression dans la découverte des éléments du crime. Et on ne peut pas installer les indices si soi-même on n’a pas toute l’intrigue.
Comment procédez-vous sur un roman : faites vous beaucoup de travail préparatoire ? Construisez-vous les personnages au préalable ? L’intrigue ?
Oui, beaucoup de réflexion en amont sur les personnes et l’intrigue. Je ne commence jamais un livre si je n’ai pas mon histoire en tête et tous mes personnages bien campés.
Il vous faut 8 mois pour écrire un roman, cela doit demander une vraie discipline. Réécrivez-vous beaucoup ?
Non, pas tant que ça. Quand j’écris, j’essaye de faire le mieux possible, et je n’avance que si j’aime les pages précédentes, pour justement ne pas avoir à tout refaire une fois le livre fini.
A vos débuts, vous avez essuyé de nombreux refus, avec du recul, qu’est ce qui ne fonctionnait pas dans l’écriture de vos histoires ?
Je ne suis pas convaincu qu’ils ne fonctionnaient pas, mais ce n’est que mon jugement.
Qu’est-ce qui vous a aidé à progresser ?
Le désir de faire toujours mieux, et le retour des lecteurs. A chaque livre, j’essaye d’analyser ce qui a plu et ce qui a moins plus, pour ne pas refaire les mêmes erreurs.
Vous n’avez pas suivit de cours d’écriture, lu de méthode de technique narrative : comment avez-vous apprit à raconter ?
Tout seul, en écrivant les livres que j’avais envie de lire. Je crois beaucoup à la maxime « c’est en forgeant que l’on devient forgeron ».
Vous citez, comme maîtres à écrire, les auteurs anglo-saxons. Que vous ont apprit ces auteurs, du point de vue de la technique ?
Je serais bien en mal de vous répondre. Je crois que c’est mon inconscient qui fait tout le travail pour moi. Il digère la façon dont écrivent les auteurs que je vénère et j’essaye seulement de prendre exemple sur eux avec mes propres histoires
Les auteurs anglo-saxon que nous avons interviewé disent « le plus important c’est d’apprendre à lire comme un écrivain », êtes vous d’accord ? C’est-à-dire ?
« Lire comme un écrivain » ? Je ne suis pas certain de comprendre le sens de cette phrase. Pour moi, le plus important, c’est d’écrire le livre qu’on aurait eu envie de lire.
Y-a-il d’autres genres que vous aimeriez explorer ?
En fait, j’ai déjà exploré de nombreux genres, mais ceux sont ces livre qui n’ont jamais été publiés 🙂
Quel conseil donneriez-vous à un aspirant auteur désirant se lancer dans la SF, le thriller ?
De prendre du plaisir, du plaisir et encore du plaisir, même si comme je le disais plus haut, c’est extrêmement difficile d’écrire. Il faut être légèrement masochiste pour écrire !
Interview réalisée par Loïc Moran