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L’importance de la tension : Tim Willocks


La dramaturgie repose sur une clé fondamentale : la tension. De la Grèce antique aux récits modernes, ce concept traverse les siècles pour faire vibrer les récits. À travers les réflexions de Tim Willocks, Aristote et Yves Lavandier, nous explorons comment la gestion de la tension est le cœur battant de toute bonne narration.

La nécessité de la tension dans toute narration est un concept aussi ancien que l’écriture elle-même. Aristote, dans sa Poétique, établit que les récits les plus marquants étaient ceux où le public ressentait une forme de catharsis, une libération émotionnelle intense par l’intermédiaire de la tragédie. Des siècles plus tard, Yves Lavandier a approfondi cette idée dans La dramaturgie, affirmant que la création d’une tension narrative est la clé pour maintenir l’attention et susciter l’émotion.

Pour Tim Willocks, romancier et scénariste britannique célèbre, ce principe est au cœur de toute œuvre de fiction. Lors d’une interview exclusive pour Les Artisans de la Fiction, Willocks a partagé sa vision de la dramaturgie et de la tension narrative :

« L’histoire prend vie lorsque vous y mettez des personnages qui luttent, souffrent, et affrontent des problèmes. Seuls les ennuis sont intéressants ».

Pour Tim Willocks, ce qui fait qu’un récit tient en haleine est précisément la capacité des personnages à surmonter des défis, à se confronter à des situations critiques, voire insolubles. La tension n’est pas un simple outil narratif, c’est l’essence même de la narration.
La tension, moteur du récit

Comme le soulignent Aristote et Lavandier, une histoire ne peut véritablement exister sans conflit, et plus précisément sans un déséquilibre qui appelle à une résolution. Aristote soulignait déjà que les héros tragiques devaient passer par une série d’épreuves, qui forment le cœur de la catharsis.

De la même manière, Tim Willocks explique : « Une histoire, c’est un problème. C’est tout ce qu’une histoire est ». Le récit se structure autour de ce problème, et le lecteur est entraîné dans la quête de sa résolution.


Ce n’est pas pour rien que Kurt Vonnegut jr a affirmé que toutes les histoires reposaient sur l’image simple de «
l’homme dans le trou » : un personnage mène une vie ordinaire jusqu’à ce qu’il tombe dans une situation désespérée dont il doit s’extraire. C’est là que la tension intervient, comme une force narrative irrésistible. « Il tombe dans le trou, essaie d’en sortir, et finit par tomber encore plus bas. Il doit atteindre le fond avant de pouvoir remonter », explique Tim Willocks.

L’univers narratif au service de la dramaturgie

La tension narrative n’est pas seulement une question de conflit entre personnages. Elle est également influencée par le monde dans lequel l’histoire se déroule. Yves Lavandier affirmait que la construction d’un univers cohérent est un pilier de la dramaturgie. Tim Willocks pousse cette idée plus loin en insistant sur l’importance de choisir un monde fascinant pour l’auteur : « Il faut aimer le monde dans lequel vous allez passer votre temps, sinon vous ne le ferez jamais vivre. » Le choix de l’univers narratif est primordial. Ce n’est qu’en se sentant véritablement investi dans le monde que l’auteur pourra y introduire des tensions réelles, des problématiques authentiques.

Il faut, selon Tim Willocks, créer des collisions dans l’histoire : des collisions entre les personnages, les idéaux, et le cadre narratif. « C’est une sorte de chaos, comme des boules de billard qui s’entrechoquent ».


Et ces collisions ne sont pas uniquement programmées par l’auteur ; elles peuvent aussi être spontanées, voire accidentelles. Tim Willocks défend ainsi l’introduction d’événements aléatoires, de coïncidences qui, loin d’affaiblir le récit, peuvent renforcer la tension et le réalisme. La vie elle-même étant imprévisible, il est légitime de laisser entrer cet élément dans la narration.

 

 L’intuition et la nécessité d’improviser

Une idée clé que Willocks partage avec Aristote et Lavandier est l’importance de l’intuition dans la construction narrative. Trop d’écrivains, selon Willocks, commencent leurs récits avec une idée intellectuelle préconçue, ce qui finit par étouffer l’histoire.

« Je pense que si vous commencez une histoire avec une idée à mettre en scène, vous ne donnez pas à l’histoire une chance de vivre ou de respirer », explique-t-il.

L’histoire doit, au contraire, être une exploration ouverte, où le récit s’écrit au fur et à mesure que les personnages évoluent. Comme le disait Arthur Miller : « Quand je découvre enfin de quoi parle la pièce que j’écris, alors je le note sur un bout de papier et je le colle au mur. »

C’est pourquoi la dramaturgie nécessite une certaine flexibilité, une capacité à improviser en fonction des personnages et des événements. Comme l’affirme Willocks, « Mettez vos personnages dans le pétrin et laissez-les s’en sortir ». C’est ce processus, cette gestion de la tension au sein du récit, qui donne à une histoire toute sa force dramatique.

Conclusion : la tension, un impératif pour l’émotion

La tension narrative, qu’elle soit produite par des conflits internes ou des événements externes, est la clé pour capter et maintenir l’intérêt du lecteur. À travers le prisme d’Aristote, de Lavandier, et des réflexions de Tim Willocks, il est évident que la tension et la dramaturgie sont indissociables de l’art de raconter. Willocks conclut, non sans insister : « Les significations naîtront après coup. Laissez-les surgir d’elles-mêmes. »

L’écriture, pour être puissante, doit rester vivante, spontanée et intuitive. C’est ainsi que naissent les grandes histoires.

 

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